Le pionnier britannique de l’énergie met en garde contre un avenir incertain tout en soulignant la probabilité croissante d’une « grande transition ».
À la fin de l’année dernière, le Dr Jeremy Leggett – entrepreneur dans le domaine de l’énergie solaire, ancien pétrolier et conseiller du gouvernement – a donné une conférence révélatrice au cours de laquelle, pour la première fois, il a exposé sa vision de deux avenirs possibles pour la société humaine.
S’exprimant à l’occasion d’un événement organisé par le magazine Resurgence & Ecologist, il a déclaré à un auditoire captivé que le monde s’approchait d’un point de rupture majeur, point où nos choix fermeraient rapidement l’un ou l’autre des avenirs possibles. Un de ces scénario promet une transition réussie vers un nouveau type de civilisation, plus évoluée. L’autre annonce la fin de la société d’abondance, le chaos despotique et le conflit.
L’ascension de la civilisation
Le scénario positif de Leggett a commencé par l’évaluation des prévisions en matière de transition vers les énergies renouvelables. Jusqu’à présent, a-t-il noté, la production d’énergie solaire a doublé huit fois en 16 ans, en partant de rien. Malgré cette augmentation exponentielle, le solaire ne fournit encore qu’environ 2 % de l’énergie mondiale.
Mais selon certains prévisionnistes, si ce rythme d’expansion se poursuit – si nous continuons à doubler encore six fois, en seulement 12 ans « vous fournissez toute l’énergie dont le monde a besoin actuellement. Pas l’électricité, l’énergie ».
En faisant appel à un cadre systémique, M. Leggett a ensuite expliqué comment une telle transition énergétique réussie pourrait rapidement transformer de nombreux autres secteurs de nos sociétés, de nos économies et même de notre politique et de notre culture.
La pollution de l’air, principale cause environnementale de mortalité à l’échelle mondiale, commence à chuter très rapidement, ce qui améliore la santé humaine. Cela efface également le « coût économique de la pollution atmosphérique », évalué à environ un « mille milliards de dollars par an » en dépenses de santé, coûts sociaux, journées de travail perdues, etc.
La fin des subventions massives aux carburants fossiles, combinée aux économies en matière de santé environnementale, représente un gain économique important pour les finances publiques. Pour la première fois, les gouvernements retrouvent de la marge de manœuvre budgétaire. Et comme les nouvelles technologies renouvelables, à ce stade, sont désormais nettement moins chères que les combustibles fossiles, d’autres fonds sont mobilisés. Il en résulte que les pouvoirs publics disposent d’une plus grande liberté en matière de dépenses sociales.
Et avec une augmentation ciblée des dépenses sociales, a fait valoir Leggett, vous vous retrouvez avec « une amélioration sociétale de la cohésion et du bien-être », car la grande transition énergétique post-carbone libère des fonds publics pour la santé, l’éducation et d’autres services importants pour les communautés.
Les hameaux, les villes et les agglomérations produisent localement, bouleversant les modèles énergétiques nationaux. Et c’est ainsi que Leggett a soutenu que nous pouvons mettre fin à l’ère des guerres de l’énergie. « Beaucoup, sinon la plupart des guerres des XXe et XXIe siècles portaient sur la maîtrise des ressources », a-t-il dit. Mais, les nations ne dépendant plus, pour leur approvisionnement, d’importations en pétrole et en gaz depuis de lointaines zones de conflit, des opportunités nouvelles se font jour pour un autre type de politique internationale.
Cette nouvelle ère ouvre ainsi la voie à « de nouveaux régimes de sécurité, à une nouvelle génération de traités ». Les gouvernements sont en mesure de négocier des traités plus facilement, ce qui permet d’améliorer encore les relations internationales.
Vers la fin du siècle, nous voyons une société mondiale « à laquelle on peut appliquer le mot renaissance, totalement différente du monde dans lequel nous vivons aujourd’hui. Peu de tensions liées aux ressources. Un monde plus stable et plus sûr. Appelons cette histoire ascension – l’ascension de la civilisation ».
La descente aux enfers sur Terre
Certains éléments de cette histoire positive ont commencé à apparaître, mais le deuxième scénario de Leggett révèle que nous serions bien plus avancés sur la voie de la dystopie.
Dans la deuxième histoire, Leggett envisageait un avenir sombre dans lequel « la technologie évolue beaucoup plus vite que ce que les gens imaginaient », avec des conséquences incontrôlées et des « inconvénients colossaux ». Tout commence, a-t-il suggéré, « avec la technologie de reconnaissance faciale et l’intelligence artificielle ». Il sera bientôt possible de faire « des choses étonnantes pour reconnaître les gens qui vont et viennent dans la rue » – un phénomène qui existe déjà en partie et qui est rapidement adopté par des entreprises comme Facebook et d’autres entreprises utilisant la biométrie. « Il n’y a vraiment pas d’échappatoire. Vous pouvez mettre un chapeau, une écharpe, des lunettes noires. L’intelligence artificielle est si performante sur ce qui reste visible qu’elle peut encore vous identifier avec 70-80 % de chances de succès ».
Leggett a concédé qu’il y avait dans ces avancées technologiques « un fort potentiel pour améliorer la société : soulager le fardeau du travail humain, poser des diagnostics médicaux, etc. La liste est longue. Mais bien sûr, elles peuvent aussi bien être utilisées à mauvais escient. Pour la première fois dans l’histoire des technologies, nous avons des travailleurs qui demandent aux décideurs politiques de réglementer ce qu’ils font ».
Poussant plus loin ces tendances, Leggett décrit un scénario dans lequel le développement rapide de l’intelligence artificielle et de la robotique « intervient alors même que l’extrême droite monte en puissance dans un certain nombre de pays. Elle est déjà arrivée aux portes du pouvoir ; bénéficiant dans les urnes, en dernier recours, des mécontentements dans de nombreux pays. Or cette droite sait utiliser ces technologies, y compris l’intelligence artificielle, pour faire avancer sa cause. Sans doute mieux que n’importe qui dans les autres camps de l’échiquier politique ».
Que se passe-t-il lorsque ces technologies sont de plus en plus utilisées par des « nations non favorables à la démocratie », qui commencent à « s’immiscer dans le processus démocratique à l’échelle de plusieurs pays ? »
La convergence de ces tendances met en évidence le risque de nombreuses incertitudes. Leggett a fait référence au scénario hypothétique suivant, comme exemple de ce que cette voie pourrait signifier pour l’humanité :
« Et puis un jour se produit un terrible incident. Une douzaine d’attaques à travers le monde, par des myriades de petits robots, des drones de la taille de la main – ces petits monstres jouent dans une toute autre catégorie – ils attaquent les défenseurs de la démocratie – politiciens, étudiants, activistes, au travers de 12 attentats à travers le monde. Attaques mortelles. Ils utilisent du venin mortel, des toxines et des engins explosifs. Le nombre de morts se mesure en centaines. »
Il s’agit d’attaques terroristes multiples dans des pays démocratiques clés, qui affolent tout le monde : « Le temps passe, les jours deviennent des semaines, les semaines des mois. La police et les services de sécurité ne trouvent pas de coupable. On pointe du doigt les terroristes religieux ou politiques, les États voyous (cela n’existe pas. Ceux qui y croient font de la conspiration…. C’est bien connu!) et les éléments rebelles au sein des démocraties ».
Et le problème, pour M. Leggett, c’est que dans cet avenir, « des millions de ces appareils sont vendus régulièrement. Et pas besoin d’être ingénieur en aéronautique pour en faire des armes mortelles ».
Leur prolifération incite les gouvernements à prendre d’importantes mesures de répression – « après cela, la surveillance est généralisée. De nombreuses démocraties organisent encore ce qu’elles continuent à appeler des élections, mais les populations vivent dans les mêmes conditions que sous les dictatures. Toute protestation est bâillonnée, y compris celle des activistes identifiés » qui craignent d’être pris pour cible de la même manière.
« Les dernières démocraties glissent, les unes après les autres, pour devenir des États policiers. Certaines gardent un simulacre de vie démocratique, sans toutefois se donner la peine de cacher que les élections sont inopérantes ou truquées. D’autres deviennent des États franchement fascistes : ce sont les fascistes qui remportent les élections. Après quoi ils s’assurent qu’il n’y aura plus d’élections. (pour ce qu’elles servent. (La dernière, en date : Macron élu avec au 1er tour 18% des inscrits et donc avec 82% de Français qui n’en voulaient pas…. )
Cela se termine dans un monde dystopique où les psychopathes se sont hissés au sommet (vous croyez que Macron…. ? Trump je veux bien, mais pas lui… notre sauveur.). Le monde est une scène de chaos dans laquelle les psychopathes et leurs monstrueux ego s’affrontent, menaçant chaque semaine de désastres militaires ; pendant ce temps, tous les autres problèmes perdurent – le monde glisse vers la pollution généralisée et l’insécurité, toujours au bord de la guerre apocalyptique entre des États policiers.
Appelons cela la descente vers ce qui serait un enfer sur Terre. »
Donner un sens à nos avenirs possibles
L’exploration par Leggett de ces deux scénarios – l’un merveilleux, plein d’espoir et enthousiasmant, l’autre épouvantable, effrayant et répugnant – démontre clairement ce qui est en jeu pour l’humanité. Dans la pratique, a-t-il expliqué à son auditoire, il est peu probable que nous suivrons exclusivement l’une ou l’autre de ces voies d’une manière simpliste. Nous voyons déjà que certains éléments de chacune des deux prennent forme sous nos yeux.
Mais à l’heure actuelle, comment ne pas conclure qu’en tant qu’espèce, à bien des égards, la majeure partie de nos activités a dévié sur la mauvaise pente, celle que Leggett décrit comme « l’enfer sur Terre ».
Avec la montée fulgurante de l’extrême droite à travers l’Europe, l’intégration de l’idéologie fasciste dans l’administration Trump, associée à la manipulation du Big Data pour interférer dans les processus démocratiques comme dans le scandale Facebook – Cambridge Analytica, nous voyons clairement que certains éléments de ces avenirs sont déjà présents.
En revanche, la crise du secteur des énergies fossiles continue de s’accélérer à un rythme qui a surpris les industriels. Le mois dernier, M. Leggett a noté que d’ici 2020, l’électricité renouvelable sera moins chère, dans le monde entier, que celle produite à partir de combustibles fossiles. Cette chute massive des prix pousse un nombre croissant de grandes multinationales, d’entreprises et de services publics à passer à une production renouvelable et neutre en carbone, plus de 100 grandes villes du monde entier produisant plus de 70 % de leur électricité à partir d’énergies renouvelables, dont 43 sont alimentées à 100 % par des énergies propres.
« Chaque semaine le message devient de plus en plus clair, pour ceux qui ont des yeux pour voir », écrit Leggett. La transition énergétique mondiale depuis les combustibles fossiles vers l’énergie propre va, à mon avis, beaucoup plus vite que la plupart des gens ne le pensent. (qu’en disent la bible, le Talmud et le coran? Y font-ils référence?)